vendredi 10 septembre 2010

LE RÊVE



Ramadane[1] a commencé cette année au Mghrib[2] le jeudi 12 août 2010, selon le calendrier dit Grégorien.
Un jour après la France.[3]
Le soir du lundi 26 ramadane[4] 1431 là-bas, avant la rupture du jeûne,[5] j’ai reçu ici un appel d’une personne dont je reconnais la voix sans difficulté.
C’est une personne qui me téléphone de temps à autre, avec parfois quelques mois d’intervalle entre les appels.
Souvent, je lui demande de raccrocher et je la rappelle pour lui éviter les dépenses de la communication.
Lorsqu’elle m’appelle, cette personne est souvent dans le « magasin » de mon beau-frère,[6] tailleur à Lkhmiçaate,[7] qui s’y rend toujours même si cela fait plusieurs années qu’il n’a plus de clients, pour retrouver des connaissances et « passer le temps ».
« Lhanoute » comme « on » l’appelle là-bas, reste une sorte de point de « ralliement ».
J’y allais souvent.[8]
Dans un message sur internet, mon neveu,[9] enseignant universitaire et journaliste, m’en a un peu parlé dernièrement :
« J’aime visiter « lhanoute » du « mari de ta sœur » (cette expression lui colle comme un second prénom).
Dans ce petit « magasin », vieux de plusieurs décennies, une sérénité parfumée de l’histoire authentique, populaire de Khémisset, me procure une tranquillité sans limite.
Je regarde cette vieille rue qui résiste encore au temps, je contemple les petits murs du « magasin » à l’intérieur, sur lesquels reposent de vieilles coupures de journaux et de vieux magazines où l’on voit des « vedettes » du cinéma français portant des costumes des années soixante, donnés en exemple par le « mari de ta sœur », le tailleur « chic » et « classe » que personne, « PERSONNE » a-t-il insisté, ne sollicite aujourd’hui.
C’est fini regrette t-il, fini le temps où il travaillait ».[10]
En répondant, j’ai écrit entre autres :
« Ce que tu dis sur le « mari de ma sœur », sur son « magasin » et le reste parle à mon cœur et subitement mes yeux s’embrument ».
En me téléphonant cette fois, la personne ne voulait pas raccrocher pour que je la rappelle, avant de m’avoir raconté le rêve.[11]
Elle arrivait à Rbate[12] en taxi lorsqu’elle a entendu une voix qui l’a incité à descendre du véhicule et c’est alors qu’elle a compris que c’était ma voix.
J’étais en haut d’un minaret,[13] et j’appelais à la prière.
J’étais habillé de blanc et ma stature était tellement impressionnante que la personne ne voyait que ma poitrine et mes bras.
Elle me parlait mais je lui demandais de se taire.
Lorsque j’ai terminé l’appel à la prière,[14] elle a pu me dire qu’elle voulait m’apporter une « jllaba ».[15]
Je lui ai fait savoir que j’en avais une dans l’avion.
En ayant une de mes sœurs au téléphone à Lkhmiçaate, je lui ai parlé de ce rêve qui venait de m’être raconté.
Pour elle, il signifie que je vais rentrer au Mghrib.
Elle va cependant demander des précisions à une de ses amies, plus douée dans l’interprétation des rêves.[16]


BOUAZZA


[1] Ramadaane, ramadan, le mois du jeûne pour les croyants et les croyantes.
[2] Le « r » roulé, Maroc.
[3] Le début ou la fin d’un mois selon le calendrier lunaire peut changer d’un lieu à l’autre.
[4] Veillée pour « laylate Alqadr » (la nuit du Destin) qui se situe dans les dix derniers jours de ramadaane (veillées des nuits qui débouchent sur les jours impairs : 21, 23, 25, 27, 29) mais que beaucoup espèrent dans la veillée du 26).
En France, cette veillée du 26 a donc eu lieu dimanche.
Alqoraane (Le Coran), sourate 97 (chapitre 97), Alqadr (le « r » roulé), La Destinée, La Valeur.
[5] Al-i-ftaar (le « r » roulé).
[6] Le mari de ma sœur de six ans plus âgée que moi.
[7] Khémisset.
[8] À l’époque, il avait des clients et travaillait beaucoup.
[9] Le fils de ma sœur de deux ans plus âgée que moi.
[10] Il est âgé de plus de soixante dix ans et il est locataire du « magasin » depuis 1957.
[11] Les croyants et les croyantes évitent de raconter les mauvais rêves.
[12] Rbaate (le « r » roulé), Rabat, érigée en capitale du Maroc par le colonialisme français qui a mis en place une « monarchie héréditaire de droit divin ».
[13] Dans le rêve, j’étais en haut du monument appelé la « tour Hssaane » ou « Hassan », un minaret dont le début des travaux remonte à 1196, et qui n’a jamais été achevé.
Ce minaret devait être celui d’un grand lieu de prosternation (masjid, mosquée) au temps de « Almouwahhidoune », « les Unitaires » (les Almohades).
Se reporter aux documents sur Ibn Toumrte (Ibn Toumert), ‘Abd Almoumine (Abdelmoumen) et autres.
[14] Al-a-dane, al-a-daane.
[15] « Djellaba », longue robe avec capuchon, en laine ou autre matières.
[16] Voir :
http://raho.over-blog.com
http://paruredelapiete.blogspot.com
http://ici-bas-et-au-dela.blogspot.com

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